Le dispositif de retraite anticipée pour pénibilité du travail est-il un leurre ? Entre le 1er juillet 2011, date de son entrée en vigueur, à début février 2012, seules 1 243 personnes en ont bénéficié. Au total, la Caisse nationale d’assurance vieillesse (Cnav), qui a récemment rendu public ces chiffres, a reçu 2 520 demandes : 418 ont été rejetées et le reste est encore en cours d’instruction.
C’est la loi du 9 novembre 2010 sur les retraites qui a instauré la possibilité de départ à la retraite à taux plein, à l’âge de 60 ans, pour les assurés sociaux ayant un taux d’incapacité physique d’au moins 20 %, reconnu au titre d’une maladie professionnelle ou d’un accident du travail (sauf accident de trajet). Il peut aussi être ouvert au salarié dont l'incapacité est comprise entre 10 % et 20 %, sous réserve qu’il apporte la preuve qu’il a été exposé, pendant au moins dix-sept ans, à un facteur de pénibilité (port de charges lourdes, travail de nuit, travail répétitif, etc.).
Six ans d’espérance de vie en moins pour les ouvriers
Lors de l’examen parlementaire du projet de loi, les syndicats avaient dénoncé ces critères, les jugeant beaucoup trop restrictifs. Le gouvernement avait assuré que 30 000 personnes par an bénéficieraient de ce dispositif. Le premier bilan montre que ce chiffre était manifestement surévalué, même si certaines explications techniques peuvent être avancées.
« Pour les retraités partis en 2011, l'avantage [de demander une retraite anticipée] était très faible car l'âge minimum légal de départ pour les salariés ayant commencé leur carrière en 1951 était de 60 ans et quatre mois, avance Pierre Mayeur, le directeur de la Cnav, dans Le Monde. De plus, il n'est pas sûr que pour certaines personnes en invalidité, il soit toujours plus intéressant financièrement de prendre leur retraite anticipée. Certains ont pu par ailleurs déjà partir plus tôt dans le cadre du dispositif carrière longue. »
A 35 ans, comme le rappelle l’Insee, l’espérance de vie d’un cadre est de six ans supérieure à celle d’un ouvrier. Et un ouvrier sur deux seulement atteindra 80 ans, contre deux cadres sur trois. Franck Seuret - Photo Jelaga