Choisir des aides techniques en temps de Covid : galère !

La Covid sème le trouble dans le secteur des aides techniques, notamment handicap. Après 2 mois de confinement, à l'automne, certains établissements referment leurs portes. Comment se procurer le bon matériel? Secteur en danger et patients impactés.

 

Pour faire le point sur cette situation dégradée, la parole à Jean-Luc Marcelin, membre fondateur et vice-trésorier de l'Ufat (Union des fabricants d'aides techniques).

Handicap.fr : L'Assemblée générale de l'Ufat, le 28 septembre 2020, a permis de faire un tour de table. Quelle est « l'ambiance » au sein des entreprises des aides techniques et comment envisager l'avenir à court et moyen terme ?
Jean-Luc Marcelin : L'annulation de tous les salons handicap en 2020 en France (article complet en lien ci-dessous) a fortement pénalisé le secteur des aides techniques (fauteuils, déambulateurs, cannes, aides au transfert…) mais c'est presque un épiphénomène parce que nous sommes surtout très inquiets pour la santé financière de nos clients, les prestataires médicaux.

H.fr : Qu'est-ce qui vous préoccupe le plus à leur sujet ?
JLM : Nous subissons, comme n'importe quel secteur économique, les conséquences de la situation sanitaire. Mais tous les acteurs ciblés « handicap », comprenant par exemple les fauteuils roulants, vont devoir faire face à une perte de chiffre d'affaires de 20 % en 2020. A l'inverse, ceux qui font du maintien à domicile n'ont pas été trop impactés parce que, à cause de la Covid et des lits d'hôpitaux à libérer, on observe une recrudescence de demandes de lits médicalisés et de matelas pour équiper les patients à domicile, qui sont pris en charge par la Sécu.

H.fr : Mais pour les matériels type fauteuil ?
JLM : Pour ces produits, il y a souvent un dépassement et un financement MDPH, et les délais, déjà pas brillants avant la crise, parfois près de six mois pour une poussette et presque deux ans pour un fauteuil roulant électrique un peu sophistiqué, sont d'autant plus rallongés. On peut alors craindre que, dans ces circonstances, certains prestataires ne cherchent pas forcément le produit le plus adapté au patient mais le plus rapidement remboursé. Cela risque de nuire aux prestations au sens large mais aussi, par ricochet, aux fabricants spécialisés dans le domaine de l'aide technique dite « premium », c'est à dire la plus élaborée, la plus confortable, la plus évolutive et souvent la plus chère. C'est assez dramatique.

H.fr : La crise sanitaire a impacté vos ventes car vous n'aviez plus la possibilité de vous déplacer dans les établissements ?
JLM : En effet, l'accès y était interdit durant deux mois et demi au printemps, même si on peut comprendre que les exploitants ont tout mis en œuvre pour protéger leurs résidents. Toutes nos équipes de vente « handicap » ont été mises en chômage partiel.

H.fr : Avec également un impact sur la prise en charge de ces personnes, qui n'ont pas pu renouveler leur matériel ?
JLM : Oui, même si nous avons observé un afflux de commandes en juillet-août, mais pas au point de rattraper les pertes. En cette rentrée, les annulations de rendez-vous réapparaissent, car certains centres referment leurs portes. Si l'on reconfine les personnes vulnérables, c'est à dire nos clients, tout le marché est à nouveau à l'arrêt et on va devoir faire face à une cascade de dépôts de bilan. Ceux qui n'ont pas su ou pu se diversifier en vendant des produits stop Covid (masques et autres) ont entamé les prêts garantis par l'Etat (PGE), et des problèmes de trésorerie pourront naître quand ils auront épuisé cette enveloppe.

H.fr : Etes-vous en pourparlers avec le gouvernement, qui sont vos interlocuteurs et que vous propose-t-on ?
JLM : On ne nous propose rien de spécifique mais il difficile de se plaindre car notre corporation n'est pas la plus mal lotie. Aujourd'hui, les secteurs qui ont de vrais problèmes sont les métiers de la restauration, de l'aviation ou, si j'en reviens aux salons, ceux qui gravitent autour de l'évènementiel. Pour eux, et je pense aux organisateurs des évènements du secteur, la situation risque d'être réellement catastrophique. Si de telles restrictions continuent de s'imposer en 2021, leur survie peut être menacée.

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